Derrière les mots, les actes. Des spécialistes des ressources humaines, une avocate en droit du travail et un représentant de SEW Usocome ont évoqué, lors d’une conférence dédiée à la Qualité de vie au travail (QVT) organisée à l’EM Strasbourg business school, tous les avantages que les entreprises peuvent retirer d’un cadre épanouissant pour leurs salariés. Un exercice qui impose d’aller en profondeur dans l’organisation du travail et le management, bien au-delà des clichés « babyfoot, panier de fruits » que véhicule parfois l’univers des startups. Bien-être, créativité et productivité sont alors la récompense partagée entre l’entreprise et les salariés.
Raisonnez-vous plutôt QVT ou RPS ? Qualité de vie au travail ou risques psychosociaux ? Si ces deux concepts ne véhiculent pas la même image, ils sous-tendent néanmoins un même enjeu pour les entreprises et les salariés : trouver la bonne recette pour rendre le travail épanouissant pour chacun. La QVT étant sans doute plus positive que les RPS… Sans forcément aller jusqu’à la notion de « bonheur au travail », l’idée est donc que chacun, à son poste, puisse trouver du plaisir et du sens dans ce qu’il fait pour l’entreprise. À la clé, l’amélioration de la qualité de vie au travail diminue donc les risques psychosociaux. Mais pas que : « Le lien avec la performance économique de l’entreprise est évident », rappelle Pia Imbs, Maître de conférences HDR, responsable du Master Ressources Humaines et de la Chaire RSE à l’EM Strasbourg business school, « à ce titre la Qualité de vie au travail doit être stratégique ».
Impliquer les managers
Un enjeu bien compris par SEW Usocome. L’entreprise basée à Haguenau a ainsi pris la mesure de l’importance de la Qualité de vie au travail dès… 1989 avec son projet Perfambiance®. « Notre ambition est de trouver le bon équilibre entre la performance et l’ambiance sur le lieu de travail », témoigne Laurent Schneider, coordinateur de ce projet. Un challenge que l’entreprise et ses managers relèvent au quotidien : en réduisant le nombre de niveaux hiérarchiques pour faciliter le dialogue, en demandant aux managers d’être présents sur le terrain ou encore en impliquant les salariés, chacun à leur niveau, dans la réflexion sur les processus visant à améliorer leurs conditions de travail et, du coup, la performance de l’entreprise. Derrière, « il faut que ces idées soient bien prises en compte et étudiées pour maintenir l’implication. Il faut aussi des indicateurs de performance qui soient accessibles et transparents », ajoute Laurent Schneider.
D’autres initiatives accompagnent ce travail en profondeur, comme l’organisation, plusieurs fois par an, d’un Afterwork informel auquel sont invités à participer les salariés, jusqu’au top management. « Les actions à mettre en place ne sont pas forcément coûteuses pour l’entreprise », abonde Isabelle Hornecker, fondatrice du cabinet spécialisé Ethica RH, « mais il est indispensable que la direction soit impliquée dans le projet ». Les managers constituent en effet un pilier essentiel de la qualité de vie au travail. D’une façon plus large, « la culture managériale qui s’appuie sur l’échange de bonnes pratiques, sur la bienveillance ou l’exemplarité du comportement est l’un des champs d’actions en matière d’amélioration de la qualité de vie au travail », explique Tania Bergmann, consultante et partenaire au sein d’Ethica RH.
La QVT, un élément de la stratégie de l’entreprise
Si la qualité de vie au travail ne se décrète pas et qu’il n’y a pas non plus de recette universelle pour y parvenir, Tania Bergmann tient toutefois à rappeler qu’au-delà de la simple responsabilité de l’entreprise, elle dépend aussi de chacun de ses collaborateurs : « On est responsable de soi autant que des autres et c’est aussi à chacun de trouver son équilibre ». Il n’en reste pas moins que la démarche QVT doit devenir un élément de la stratégie des entreprises, soutenue par la direction et mesurée par des outils de pilotage. « En choisissant des axes prioritaires, on peut obtenir des résultats rapides qu’il faut reconnaître et fêter » conclut-elle. Il en va de l’image de l’entreprise et de sa capacité à attirer et à fidéliser ses collaborateurs.
Sur le terrain de la prévention des risques psychosociaux, c’est aussi la responsabilité juridique de l’entreprise qui est en cause. Plusieurs textes se sont succédé (notamment l’ANI en 2013, la Loi Rebsamen en 2015) pour apporter un cadre juridique sur les obligations des entreprises en matière de dialogue social sur les thèmes de la qualité de vie au travail et de la prévention des risques psychosociaux. Mais plus que les textes, « c’est la jurisprudence qui s’est montrée impitoyable sur ces questions à l’égard des entreprises, avec la possibilité d’un cumul des indemnités dues selon le préjudice et si le harcèlement ou la passivité de l’entreprise sont démontrés », explique Maître Marie Tognazzi, avocate en droit du travail.
Mais avant même la case judiciaire, les chiffres démontrent à eux seuls les avantages qu’il y a à se pencher sur la qualité de vie dans l’entreprise : l’Insee révèle que 68% des Français estiment avoir des problèmes de santé, dont la moitié pour des raisons professionnelles. Elle estime également le coût du mal-être en entreprise à 12600 euros par an et par personne en France ! Un regard plus positif sur les chiffres nous vient de SEW Usocome, qui déclare pour sa part un taux d’absentéisme de ses collaborateurs inférieur à 3% ou encore une ancienneté moyenne de ses salariés supérieure à 16 ans... Il n’y a pas de hasard !